Le Suicide assisté- Anneke Quinta, docteur en médecine

Publié le par Florymawit


 Le Suicide assisté- Anneke Quinta, docteur en médecine
Le Suicide assisté
Anneke Quinta, docteur en médecine
« Aidez-moi à mourir », m'a-t-elle dit. Je regardai Margaret avec surprise. L'intelligente femme Galloise était ma cliente depuis plusieurs semaines. Ayant tenu tête à plusieurs opérations majeures en notre chirurgie, elle devait maintenant en subir une autre. Habituellement optimiste, elle partageait mon opinion que ce séjour à l'hôpital serait le dernier.
La demande de Margaret semblait raisonnable. Ses pensées étaient claires. Étant consciente de sa condition qui détériorait, elle pensait que la meilleure solution serait de terminer sa vie. Sa maladie étant inguérissable, elle désirait épargner à sa famille, et à elle-même, la douleur d'une souffrance prolongée. Capable de prendre une décision, elle formulait clairement son vœu.
Les semaines suivantes, son état empirait. Un après l'autre, les allègements conventionnels n'aidaient en rien, et mon sentiment d'insuffisance augmentait. Margaret me demandait souvent de l'aider à mourir. Confrontée par cette prière, je ne pouvais plus contourner la question. Était-ce permit aux médecins d'aider des clients comme elle à se suicider? Beaucoup considèrent le suicide, assisté médicalement, comme étant le choix personnel extrême. Avec une certaine guidance, pensent-ils, Margaret et d'autres personnes comme elle pourraient avoir ce qu'elles désirent. Une étude récente de l'université de Michigan propose ces points de guidance. Premièrement, le malade doit être un adulte mentalement sain, dont la mort est attendue dans un délai de six mois. Deuxièmement, le malade doit avoir demandé l'assistance du médecin pour terminer son existence, plus d'une fois. Troisièmement, un second médecin doit examiner le malade, et être du même avis sur la diagnose et la perspective. Le résultat de l'étude fut que 66% du public, et 56% des médecins visités, favorisaient la législation du suicide assisté, à la condition que ces points de guidance soient suivis (1).
Sommes-nous conscients de ce que nous sommes entrain de faire? Peut-être, devons-nous apprendre des pays Néerlandais, nation où une direction similaire est déjà en effet. En vue de déterminer si ce système fonctionnait bien, le gouvernement Hollandais a rassemblé les données de 8 100 cas, en lesquels les médecins avaient prescrit des doses trop fortes de médication fatale. Ils ont trouvé que 61% des malades n'avaient pas consenti à leur mort (2). Les médecins ont défendu leurs actions en disant qu'ils croyaient agir selon la volonté du malade, ou de la famille du malade. Cependant, 45% de ces cas montraient que les médecins n'avaient même pas consulté les membres de la famille (3). Deux cas légaux récents montrent aussi qu'il y a des abus, malgré les régulations. Ainsi, un psychiatre avait assisté un client souffrant de dépression, mais autrement en bonne santé, à se suicider, sans avoir soigné son état de dépression. La cour de justice a simplement réprimandé le médecin, disant que son action minait la foi en la profession médicale. Dans un autre cas, un gynécologue a donné une injection fatale à un bébé très sévèrement handicapé. La cour d'appel a déclaré que le médecin avait fait « un choix justifié ».
Comment se fait-il que les Hollandais ont ainsi manqué de suivre leurs propre principes, malgré leur progrès en sécurité sociale et en leurs systèmes légaux? Sont-ils une exception à la règle? Regardez cet emprunt d'un article dans le New York Times:
Le mémorandum ... proposé : que « ce soit permis au médecin de mettre fin aux tortures des malades incurables, sur prière, dans l'intérêt de la vraie humanité ». L'incurabilité serait déterminée non seulement par le médecin personnel, mais aussi par deux autres médecins officiels, qui examineraient soigneusement le patient, de même que son histoire pathologique ... le patient, lui-même, doit le demander « expressément et sérieusement », et « au cas où le patient ne puisse plus exprimer son désir, ses propres parents, agissant de motifs qui n'enfreignent pas la morale, devront le solliciter » (4).
Cette rhétorique ressemble au débat courant à propos de l'assistance au suicide, et la règle à suivre est semblable à celle choisie par la majorité des médecins et du public, d'aujourd'hui. Pourtant, l'article date de 1933 et le mémorandum cité, fut issu par personne d'autre que le Ministre de Justice, de l'Allemagne de Hitler.
L'effet de ce mémorandum vaut la peine d'un examen. L'Association Médicale Allemande organisa un système en vue de réaliser cette proposition, légalisant le suicide assisté médicalement. Les médecins commencèrent avec des patients compétents, souffrant de maladies terminales, qui le demandaient, puis aussi avec des malades mentalement incompétents, et éventuellement, avec toute personne, inutile à l'État — économiquement ou idéologiquement. Entre 1933 et 1941, plus de soixante-dix mille « personnes atteintes de maladies mortelles » furent mises à mort dans des hôpitaux Allemands.
Pour l'État, le bénéfice principal du « Programme T4 Euthanasie », comme on l'a connu, était économique. Il permettait d'épargner 88 million de marks par an. (5) Le programme visait à « engrener une action économique dans le marché de sécurité médicale, dont le coût était l'utilisation efficace de ressources limitées ». (6) Est-ce que ceci ne ressemble pas à un journal médical économique contemporain ? En vue d'en accroître l'efficacité, les Nazi ont transféré la technique développée en ces T4 hôpitaux mortels, dans des centres spécialisés — d'extermination.
Pour beaucoup en notre société aujourd'hui, la prémisse que certaines vies humaines ne valent pas la peine de sauver, n'est pas choquante. Généralement on le nie, on le couvre d'euphémismes, mais cependant ceci est à la base de l'approbation universelle du suicide assisté, et voilà pourquoi la leçon historique s'applique à notre situation ... Appelez-moi un alarmiste, mais il me semble vraiment que la sécurité sociale médicale Américaine est aujourd'hui dangereusement influencée par ce qui s'est passé en Allemagne en 1930-1933.
L'opinion publique est en faveur du suicide assisté par un médecin, et les ordonnances du juge le reflètent. La Cour d'Appel du Neuvième Circuit a récemment renversé le ban, mis par l'État de Washington sur le suicide assisté par un médecin, en disant que « le droit de déterminer le moment et la manière de la mort » l'emporte sur le devoir de l'État de préserver la vie. (7) « Qualité de vie » a remplacé le concept du « Caractère sacré de la vie ».
Des sociétés extrêmement bien organisées, obsédées de l'utilisation efficace des ressources, ont maintenant le contrôle d'une grande partie de la sécurité sociale. De plus en plus, c'est le coût, les frais, qui semblent influencer les soins que l'on donne aux mourants, plus que toute autre chose. Si les meilleurs soins médicaux ne sont pas donnés selon les moyens de chacun, le pauvre sera bientôt forcé de « choisir » le suicide au lieu de soins médicaux prolongés, et couteux. Il est facile alors de comprendre comment le « droit » de mourir pourrait être une sentence de mort, pour les plus vulnérables.
Alors, qu'en est-il de Margaret ? Étant donné son registre--historique et contemporain — il m'est clair que nous ne pouvons jamais permettre l'acception du « suicide-assisté d'un médecin » dans notre pays. Il m'est de même clair, comme chrétien, que personne n'a le droit d'assister une autre personne à prendre sa propre vie, ou à décider l'heure de la mort. D'autant plus, devons-nous tout faire pour rendre la mort un passage aussi positif et confortable que possible.
En tant que docteurs, infirmières, gardiens, il nous faut pourvoir plus que les soins de santé, et en tant que familles, il nous faut pourvoir plus que l'argent. Nous devons, et nous pouvons faire plus, même très simplement, sur un niveau personnel. Il faut que nous aidions nos malades, nos parents, nos voisins âgés, et nos collaborateurs, à sentir que nous avons tellement besoin d'eux, qu'ils ne veulent pas mourir. Au lieu d'éviter les mourants, ou de leur laisser sentir (même subtilement), qu'ils nous soient un fardeau, nous devons, au contraire les entourer d'amour. S’il en est ainsi, le suicide assisté, sera-t-il un point en litige?
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